Préférence européenne : l’ambition ou la disparition ?

Depuis des décennies, l’Europe s’est vue comme un havre de libre-échange et d’ouverture. Une grande idée, portée par des valeurs de coopération, d’interconnexion et de prospérité partagée. Mais aujourd’hui, cette vision se heurte à une réalité brutale : dans un monde où chaque grande puissance joue pour elle-même, l’ouverture sans maîtrise est devenue une faiblesse. Une question s’impose alors : l’Europe peut-elle encore exister sans choisir l’ambition ?

L’idée de la préférence européenne n’est pas nouvelle, mais elle devient urgente. Pendant que la Chine subventionne massivement ses industries stratégiques et que les États-Unis renforcent leurs chaînes de valeur nationales, l’Europe reste un terrain de jeu où les règles sont dictées par d’autres. Chaque accord qui avantage des acteurs extérieurs, chaque dépendance technologique ou énergétique qui se creuse, est une fracture dans notre avenir collectif.

Deux réalités me frappent. D’abord, l’Europe possède tout ce qu’il faut pour réussir : des talents, des infrastructures et un savoir-faire inégalé dans des secteurs clés comme l’énergie verte, l’intelligence artificielle ou l’aéronautique. Mais ces forces restent dispersées, sans le cadre nécessaire pour s’imposer face aux mastodontes mondiaux. Ensuite, il y a l’absence de vision partagée. Nous sommes encore paralysés par des débats internes, pendant que d’autres bâtissent des empires technologiques et imposent leurs normes.

Et pourtant, la préférence européenne n’est pas un repli. Ce n’est pas refuser le monde, mais prendre en main notre propre destin. C’est affirmer que nous voulons exister en tant que puissance capable de rivaliser, d’imposer nos règles, et de protéger nos intérêts. La souveraineté ne doit pas être un mot vide, mais une ambition concrète, portée par des décisions courageuses.

Mais cette ambition soulève des questions. Comment harmoniser les politiques industrielles de 27 pays ? Comment concilier protection des marchés européens et maintien de relations commerciales avec le reste du monde ? Et surtout, comment éviter que cette préférence ne devienne un simple slogan, déconnecté des réalités économiques ?

Nous ne pouvons plus attendre. L’histoire ne pardonne pas les hésitations. Chaque retard se paie par une dépendance accrue, chaque occasion manquée est une chance offerte à ceux qui n’ont pas ces scrupules.

Imaginez une Europe qui impose ses propres normes technologiques. Une Europe où l’énergie renouvelable n’est pas seulement une option, mais un levier de leadership mondial. Une Europe où les entrepreneurs et innovateurs trouvent les conditions idéales pour prospérer, sans devoir partir ailleurs.

La préférence européenne, ce n’est pas une idée du passé. C’est une vision pour l’avenir. Et si un jour, les générations futures regardent cette époque, elles se demanderont peut-être : « Comment avons-nous osé risquer de disparaître avant de choisir l’ambition ? »

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Retour en haut